À la chasse au ciel bleu

Aah, les Rocheuses enfin ! Ou pas.

De retour de mon circuit de canot, je repasse une nuit à Quesnel et retourne dans le sud en bus, par la même route par laquelle je suis arrivée. Un peu à regret car j'aurais bien aimé continuer en avant, plus au nord. Mais je veux être aussi dans les Rocheuses avant la fin de l'été. Ce n'ai pas facile de tout voir en une seule saison, et je me dis de plus en plus que je vais devoir y retourner l'été prochain. Une allemande rencontrée en faisant du pouce me disait qu'elle s'était établi ici à la suite de son permis d'étude car elle n'avait pas fini de tout voir. Elle y est depuis 15 ans et n'a toujours pas fini d'en faire le tour !

Je retourne à Kamloops, ville dans laquelle j'ai commencé mon voyage il y a plus d'un mois. C'est une place un peu centrale. La route traverse essentiellement des pâturages et des ranches, ça fait très pays de cowboys. Il y a constamment une brouillard gris sombre, la même chose que ce que je voyais dans Tweedsmuir et un peu à Bowron Lake mais en beaucoup plus dense. En fait j'apprends que c'est les feux de forêts un peu partout dans la province, au moment où j'écris, il y en a plus de 400 en cours. Le soleil n'est qu'une faible boule rouge dans le ciel, la visibilité est vraiment restreinte. En marchant dans Kamloops, je me crois vraiment au milieu d'une grande ville chinoise surpoluée. Je reste 2 jours dans un camping pas si mal en attendant un covoiturage vers Revelstoke, dans les Rocheuses.

Revelstoke est une ville de station de ski, il y a des bars, des hôtels, des restaurants et des magasins de sport. C'est à peu près tout. Je poursuis vers Golden, encore plus à l'est dans les rocheuses. La visibilité est vraiment mauvaise, je suis censé être entouré de montagne mais je ne vois rien, on est encore plus dans la fumée. Ça sert à rien de poursuivre encore si je ne verrai rien du paysage, donc je décide d'attendre quelques jours à Golden, dans une auberge. C'est une auberge de jeunesse toute petite tenue par une Écossaise, Tania. Elle vit d'ailleurs dedans et on est peu nombreux, donc il y a une ambiance très familiale. Elle est assez bavarde et parle sans cesse de l'Europe, pour critiquer les politiques en Amérique du nord, c'est amusant de l'écouter. Après 1 jour à ne rien faire à part visiter la ville et revoir un peu mon itinéraire de rando dans les rocheuses, avec Kathrin, une allemande de l'auberge, on loue le 2 ème jour des vélos de montagne et on part sur les sentiers (il y a tout un réseau dédié au vélo de montagne, comme dans à peu près toute les villes dans les rocheuses). Malheureusement elle n'a pas trop la forme et je continue tout seul alors qu'elle va faire du vélo en ville. Même moi de toute manière c'est assez intense, je n'avais jamais vraiment fait du vélo de montagne dans des sentiers accidentés comme ça. La pollution de l'air est en plus vraiment extrême ce jour là, ça sentait même carrément le brûlé et ont dépassait le niveau des villes les plus polluées de Chine. Pas très malin d'avoir fait du vélo ce jour là mais en même temps je n'allais pas rester enfermer dedans toute la journée.

À part ça Golden est sympa comme petite ville, un village plus tôt. Je visite son musée qui parle beaucoup des premiers explorateurs qui ont parcouru et cartographié l'ouest du Canada à la recherche d'une route praticable à travers les Rocheuses et les autres chaines de montagnes pour le commerce et, plus tard, la construction d'une voie de chemin de fer. Beaucoup de Suisses ont ensuite immigrés ici, employés comme guides de haute montagne par le Canadian Pacific Railway quand le tourisme a commencé à se développer et que de plus en plus de clients de la compagnie de chemin de fer se perdaient ou restaient coincés sur des sommets. Les Suisses étaient déjà réputés pour être de très bon alpinistes ! Tout ça m'intéresse beaucoup donc.

Je vais boire des bières à la microbrasserie locale avec Alex et Thomas, un couple de Canadiens avec qui je m'entends très bien (en fait Alex est une québécoise anglophone de Montréal qui a immigré ici).

Trois jours sont passés, c'est de pire en pire. Je décide d'abandonner et de faire demi tour. En regardant la qualité de l'air dans la province, il y a deux places où c'est un peu moins pire : l'ile de Vancouver et le nord. Je décide d'aller à la première. J'ai une rando à faire là-bas, que je comptais plutôt faire en automne à la base. Et par la même occasion je vais aussi en profiter pour faire du kayak de mer tant qu'il fait encore beau et chaud, c'est plus agréable.

Je retraverse donc toute la province d'est en ouest en une journée, en pouce et covoiturage, pas si mal. Environ 700km. Je suis notamment pris par un jeune couple, je monte dans leur camion et il y a une troisième personne à l'arrière : un français qui faisait du pouce lui aussi ! Faut le faire quand même ! De Kamloops à Vancouver, je covoiture avec un indien immigré ici et ses parents en vacance. Il m'offre plein de très bon biscuits fris aux épices fait par sa mère. J'arrive à Vancouver le soir. Je suis un peu perdu, je n'ai plus l'habitude des grandes villes.

J'arrive dans une auberge voir si ils ont encore de la place. C'est assez marrant pour en parler ici : premièrement il n'y a aucun personnel sur les lieux. La procédure d'arrivée est un vrai jeu de piste. Premièrement il faut appeler un numéro où une personne confirmer la disponibilité ou pas. Ensuite envoyer ses informations et une photo d'une preuve d'identité par une messagerie propriétaire bien connue, mais ils sont Ok pour le faire par MMS aussi heureusement. J'attends une dizaine de minute avant de recevoir en retour un code et une adresse (qui n'est pas le bâtiment où je suis). Je me rend à cette adresse, et je dois y chercher une boite à clé qui s'ouvre avec le code reçu. Dedans il y à plein de jeux de clés. Je dois en trouver 3, une pour ouvrir la porte du bâtiment, une seconde pour la porte de la suite, et une troisième pour enfin entrer dans le dortoir. Une fois rendu là, je dois à nouveau envoyer un message comme quoi je suis enfin arrivé (je suis sûr qu'ils doivent tenir des stats sur celui qui y arrive le plus rapidement !). Seulement là, un gars débarque pour collecter l'argent et repart. Ce sera la seule personne que je verrai de l'auberge.

J'arrive à Victoria, capitale de la province à la pointe sud de l'ile de Vancouver le lendemain soir et décide d'abord de partir sur le Juan de Fuca Trail et de visiter la ville à mon retour dans un second temps. Ça commence à faire un bout que je n'ai pas randonné, ça commence à me manquer.

La fumée est par contre toujours là meme si beaucoup moins épaisse. J'ai traversé toute la province sans voir un seul bout de ciel bleu...